Fabrique “Tochmash” de Vladimir

A l’origine de la production horlogère de Vladimir, une ancienne cité russe située à 180 km au nord ouest de Moscou, il y a une usine textile fondée en 1910 par un fils de marchand, Piotr P. Belov, et entrée en activité en 1911. L’usine produisait du calicot – une cotonnade à motif imprimé pour l’ameublement) au moyen de 315 machines à tisser.
En 1925, l’usine Belova est rebaptisée Fabrique « Pionnier », dépendant du GSNH (Gubtekstiltresta) et connaît un développement rapide avec l’industrialisation de l’URSS. Des bâtiments nouveaux pour la production (déjà 1.200 machines employant 1,500 ouvriers en 1927) mais aussi des logements ouvriers, une clinique, une centrale électrique, etc. Et puis de nouveaux bâtiments pour le tissage les finitions, la teinture etc.

1927: les nouveaux bâtiments de l’usine textile « Pionnier »
1933: le complexe industriel vu de la rivière Kliazma

En 1933, un projet de construction d’une usine de gramophones a été approuvé. Le projet est au coeur du mouvement stakhanoviste (400 travailleurs de choc en 1937).  De nouveaux bâtiments industriels sont construits – ainsi que les bâtiments annexes (blocs de logements pour les ouvriers etc.). Jusqu’à la guerre, la fabrique produire 150.000 gramophones et 300 millions d’aiguilles par an.
En 1939, a lieu le transfert de l’usine au Commissariat du Peuple des munitions, elle prend le nom de de Fabrique N°260 et commence à produire des fusées pour mines, bombes, obus et roquettes.

L’usine de gramophone, flambant neuve, qui accueillera plus tard la production horlogère
A l’usine de gramophone (1939?)

Lorsque la guerre éclate, 400 travailleurs de la fabrique se portent volontaires pour aller combattre au front. En octobre 1941, en raison de l’avance des troupes hitlériennes, la fabrique est déménagée à Perm où sous le nom de Fabrique N°521 elle reprend la fabrication d’éléments de munitions. Environ 1.200 travailleurs de l’usine recevront des prix pour leur contribution à la production de guerre.
La défaite des hitlériens devant Moscou permet le retour de la fabrique à Vladimir.
En 1945, la fabrique relance la production de gramophones, retour (très partiel) à une production de temps de paix.

Au début de 1946, elle quitte le giron du Ministère des munitions pour dépendre du Ministère des Machines agricoles : elle commence à produire des machines agricoles mais aussi d’autres biens de consommations (comme des fermetures de fenêtres).
A l’initiative de l’ingénieur en chef, I. Ya. Eliseeva, une production horlogère commencent en 1947 : les célèbres horloges « Vesna » (Printemps).
En 1949, la fabrique est transférée au Ministère de l’armement et elle prend le nom de Fabrique P/B N°50, puis au Ministère de la Défense. Entre 1955 et 1958, la fabrique produit des montres-bracelet « Pobeda » reconnues pour leur qualité.

Le logo de la fabrique; il y a parfois владимир (Vladimir), écrit en-dessous en petites lettres
Une « Pobeda » de la Fabrique de Vladimir (1955)
Avec son mécanisme de la 2e Fabrique de Montres de Moscou
Un Pobeda produite à Vladimir, avec les initiales de la fabrique (ВЧЗ)

L’arrêt de la production de « Pobeda » n’interrompt pas la production horlogère : l’usine continue à produire les horloges de marque « Vesna » (mais aussi de marque Vladimir) – et fournira des mécanismes pour réveils-matin à la Fabrique d’Horloge d’Erevan.

Une horloge « Vesna » (collection B. Hanoï)
Une horloge de marque « Vladimir »

En 1958 commence une nouvelle époque pour la Fabrique qui commence la production, unique alors au monde, d’un équipement qui allait devenir l’équipement type pour l’enrichissement de l’uranium et qui fait encore aujourd’hui la renommée de la fabrique de Vladimir : des centrifugeuses à gaz.
L’uranium naturel contient essentiellement de l’uranium 238 et seulement 0,71%  d’uranium 235 – celui qui peut provoquer une réaction de fission nucléaire. Comme les deux isotopes ont les mêmes propriétés chimiques, on se base sur la légère différence de masse (trois neutrons) entre eux. L’uranium vaporisé est alors traité dans des centrifugeuses qui permettent de séparer l’uranium 235 (plus léger) de l’uranium 238. Pour la création de la première centrifugeuse à gaz, l’ingénieur en chef de l’usine I. Ya Eliseev a reçu le prix Lénine en 1964.
Entre 1956 et 1960, la fabrique diversifie sa production : machines agricoles, machines textiles, éléments de matériel  de photographie, de radiophonie, de radiographie etc. En 1961, elle maîtrise le moulage des matières plastiques, en 1964 elle inaugure une nouvelle ligne de production de machines-outils et en 1965 elle produit les éléments électriques pour les automobiles Moskvich 408 dont la production commençait cette années là à Izhevsk par le conglomérat « Izhmash » (surtout connu pour sa production d’armes, à commencer par la célèbre Kalashnikov).
Devenue en 1966 la Fabrique « Tochmash » de mécanique de précision de Vladimir, elle produit du matériel pour la défense et introduit de nouveaux procédés de production utilisant des équipements informatiques, des systèmes automatisés et des robots industriels. Le 18 janvier 1971, par décret du Présidium du Soviet suprême, la fabrique reçoit l’Ordre de Lénine pour la mise en œuvre réussie du plan du 8e plan quinquennal, le développement et la production de centrifugeuses à gaz.

A la Fabrique « Tochmash »

A partir de 1974, elle développe et la produit en masse de cartes de circuits imprimés et des composants électriques pour la nouvelle Fabrique d’automobile d’Izhevsk.
En 1977, les besoins de la production militaire lui fait ouvrir une autre à Kovrov (maintenant Kovrovsky Instrument Factory), et par arrêté du Ministère de l’outillage mécanique N°194 du 25 mai 1977 « Tochmash » devient une Association de production et est affectée au ministère de l’Industrie de la Défense. Entre 1977 et 1998, l’Association de Production « Tochmash » de Vladimir a deux grands secteurs d’activités : du matériel pour la défense et les centrifugeuses de séparation de gaz pour l’enrichissement de l’uranium. La fabrique produit cependant encore des biens de consommation tels que des magnétophones, des récepteurs radio, des horloges et les équipements électriques pour automobiles.
A la fin des années 80,  la réduction des commandes militaires induit une nouvelle reconversion. En 1992, la fabrique produit par exemple la production de compteurs domestiques de l’eau froide et chaude ou de débitmètres de gaz (et toujours les horloges Vesna…). Cette conversion est un succès : de 1997 à 2004, le volume de la production a augmenté de 6,7 fois, et en 2004, Tochmash fabrique son deux milliardième produit !

Le siège de Tochmash aujourd’hui
Exposition des divers modèles de Vesna en 2016

27 avril 2007 un décret du président Poutine « Sur la restructuration de l’industrie de l’énergie nucléaire de la Fédération de Russie» inclut le « VPO » Tochmash est inclus dans le nombre d’entreprises devant être transformées en sociétés par actions dont les actions doivent être apportées dans le capital de l’OAO « Énergie Nucléaire ». D’autres réformes suivront, qui aboutiront à faire de Tochmash, qui toujours une référence en matière de production de centrifugeuse à gaz, un élément du conglomérat d’état russe de l’énergie nucléaire Atomenergoprom.

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