Les montres du Spartak Moscou

Plusieurs montres célèbrent le Spartak de Moscou, comme cette Komandirskie « Kadet »

(collection B. Hanoï)

Ou cette Pobeda:

(photo: chassy-sssr)

Le FC Spartak Moscou (Футбольный клуб Спартак-Москва) est la section football du club omnisports du Spartak Moscou. Son histoire remonte à 1921, quand le Cercle sportif de Moscou du quartier de Presnia (rebaptisé plus tard Krasnaïa Presnia) a été fondé par Ivan Artemyev qui recruta Nikolai Starostine, le père du football soviétique.
Nikolaï Starostine, était né le 13 février 1902 dans le quartier ouest de Moscou, Presnia. Nikolaï est l’ainé d’une fratrie de six frères et sœurs. Starostine intègre la sélection moscovite et joue plusieurs matchs internationaux.
De 1926 à 1930, Krasnaya Presnia change de nom et devient Pisheviki. L’équipe participe à des championnats régionaux (ou elle remporte un titre de champion) ainsi qu’à des tournées à travers l’Union soviétique. Nikolaï joue à ce moment-là aux côtés des meilleurs joueurs du moment. En 1934, il obtient le titre de « Maitre des Sports d’URSS »: il est considéré comme le meilleur ailier droit de l’équipe d’URSS et impressionne par sa vitesse, son charisme et son apport offensif.

Nikolai Sarostine, capitaine de la sélection de l’URSS

Ses frères intègreront durant toutes ces années, différents clubs, jouant avec leur frère ainé. Cette situation amènera par la suite quelques anecdotes :
Le Spartak jouait un match à l’étranger. Le journaliste local demanda la composition d’équipe :
– Qui joue à droite de la défense ?
– Starostine
– Milieu de terrain axial ?
– Starostine
Et à côté de lui ?
– Starostine
Et l’ailier droit ?
– Starostine
J’ai compris, répondit le journaliste, Starostine signifie footballeur en russe…

Nikolai Starostine n’était pas qu’un excellent joueur, c’était aussi un excellent organisateur. Grâce à lui, le club s’est développé en récupérant de l’argent grâce à la vente des billets et en participant à des matches partout en Russie. Bénéficiant de la réorganisation du football en URSS en 1926, Starostine a réussi à faire en sorte que son club soit sponsorisé par l’Union des coopératives de produits alimentaires, la Promkooperatsia. Alors que le Dynamo Moscou était soutenu par le NKVD et le CSKA Moscou par l’armée, le fait que le Spartak était sponsorisé par les kolkhozes et des sovkhozes (ce qui vaut à ses joueurs le surnom de « viande », мясо), le faisait apparaître comme le club du peuple. De fait, il devint le plus populaire du pays.
Alors appelé Pishcheviki, le club s’installe dans son nouveau stade de 13.000 places, le Stade Tomski, nommé en l’honneur du dirigeant des syndicats soviétiques, Nikolai Tomski. Mais c’est surtout son partenariat avec Alexandre Kosarev, secrétaire de l’Union de la Jeunesse Communiste (Komsomol), qui va donner une autre dimension au club.
Le Komsomol participait activement à la vie sportive du pays et Alexandre Kosarev cherchait à encore accroitre son influence dans le monde du football. Kosarev se mit en relation avec Nikolaï Starostine et ses frères pour créer une nouvelle Société Sportive impliquant la Promkooperatsia et l’ensemble des syndicats des travailleurs. Nikolaï Starostine s’attela à la tâche et en 1935 et ainsi la Société Sportive Spartak vit le jour dont il devient Secrétaire général. C’est lui qui la nomma, inspiré par le livre Spartacus de Raffaello Giovagnoli, « parce que dans ce mot court se cache une volonté de rébellion, une sensation d’indomptable. » et qui en dessina le logo.

La statue de Spartacus devant le nouveau stade du club

Depuis 1931, l’URSS célébrait sa Journée de la culture physique. Dans toutes les grandes villes de l’URSS, les athlètes masculins et féminins des différentes organisations sportives défilaient et faisaient des démonstrations. A Moscou, 10.000 invités de prestige se pressaient sur les gradins pour regarder le défilé avec les responsables soviétiques. A ces occasions, les différences entre les athlètes du Spartak et du Dynamo étaient évidentes. Les athlètes du Dynamo représentaient la police et, par extension, les autorités, défilaient avec ordre, tandis que les représentants de Spartak montraient un peu de spontanéité.
Le célèbre match de football sur la Place Rouge en 1936 en est un exemple. Pour préparer ce match, environ 300 athlètes du Spartak ont ​​cousu, avec des aiguilles de cordonnier, un tapis de feutre vert géant qui recouvrirait les pavés. Le tapis avait la taille d’un terrain de football et était stocké au Kremlin. Le Spartak fit jouer son équipe première contre son équipe seconde. Starostin et Kosarev ne voulaient pas décevoir ou ennuyer Staline avaient programmé sept buts pendant le match. Le match s’est tellement bien passé qu’il a duré 43 minutes (au lieu des 30 minutes prévues), bousculant l’organisation des cérémonies. Le Spartak est ainsi crédité d’avoir réussi à introduire de la spontanéité et de la surprise dans une Journée strictement planifiée.
Le championnat d’Union soviétique de football fut institué en 1936 et le premier champion en fut le rival, le Dynamo Moscou. Mais dès la deuxième édition, tenue elle aussi en 1936: c’est le Spartak qui sort vainqueur. Le Spartak glanera encore deux titres de champion avant la seconde guerre mondiale (1938,1939).

L’équipe du Spartak en 1936

Malheureusement pour le Spartak, Aleksandre Kosarev fut arrêté et exécuté en 1938, en raison de son étroite amitié avec le chef du NKVD, Nikolai Iejov, qui a lui-même mené la plus grande purge stalinienne. L’homme qui a remplacé Iejov était Lavrenti Béria. D’origine géorgienne, passionné de football depuis son enfance, il a joué pour le Dynamo Tblissi dans sa jeunesse et a même affronté Nikolai Starostine sur le terrain! Lorsque Béria a été nommé à la tête du NKVD, il prend en main le Dynamo Moscou et assiste à tous les matchs de l’équipe. En 1937, les frères Starostine avaient déjà été accusés d ‘« avoir importé des méthodes bourgeoises dans le sport soviétique », mais avec l’aide de Kosarev, ils avaient évité la prison. Après l’exécution de Kosarev, les dirigeants du Spartak n’avaient plus de protection et en 1942 un nouveau procès a lieu. Beria avait forcé plusieurs athlètes Spartak à avouer que les frères Starostine avaient prévu d’assassiner Staline pendant le match sur la Place Rouge. Nikolai Starostine et ses trois frères ont tous été condamnés à 10 ans de camps de travail.
Leur notoriété et la passion du football en URSS, y compris chez les généraux du goulag, les protégèrent du pire. Ils se trouvèrent à entraîner les équipe de football des régions de déportation. Nikolaï Starostin raconte ainsi une conversation entre généraux du NKVD.
« – Alors, quand arrives-tu avec ton équipe, à Ukhta, pour que je te batte à plate couture ? demanda Burdakov.
– Je viens, je viens, répond Barabanov. On verra qui bat l’autre, surtout que j’ai maintenant une équipe entrainée par Starostine!
– Quel Starostine ?
– Alexandre… voilà lequel.
– Ah bon? Peu importe, viens… Mon Starostine, Nikolaï, montrera à ton Starostine où les crabes hibernent.
– Eh bien, nous verrons cela.
Voici comment j’ai appris où Alexandre purgeait sa peine. »

A la mort de Staline, les frère Starosine sont libérés, réhabilités, et réintégrés dans leur fonction.
Nikolai Starostine dirigera le Spartak jusqu’en… 1992!

Dans le stade: monument à la mémoire des frères Starostine

Durant les années 1950, le Spartak et le Dynamo continuent de se disputer la première place du classement et le Spartak remporte quatre nouveaux titres (1952, 1953, 1956, 1958). L’équipe nationale soviétique qui remporta la médaille d’or aux Jeux olympiques d’été 1956 à Melbourne en 1956 était composée largement de joueurs provenant du Spartak.

Tableau d’honneur du Spartak pour l’année 1958

Bien que le Spartak remporte deux nouveaux titres (1962, 1969), de nouvelles équipes connaissent le succès comme le Torpedo Moscou et surtout le Dynamo Kiev, ce qui fondera une nouvelle rivalité historique pour le club.
Le club continua son déclin dans les années 1970 avant d’être même relégué en division inférieure en 1976. L’année suivante, le stade était toujours plein et le nouvel entraîneur Konstantin Beskov introduit de jeunes joueurs. Le Spartak remonta l’année suivante et remporta le titre de champion en 1979. Champion en 1987, le Spartak remporte son dernier titre d’URSS en 1989 en battant son principal rival le Dynamo Kiev.
Son équipe a remporté 12 Championnats d’Union soviétique de football (seul le Dynamo Kiev, détenteurs de 13 trophées, en a gagné plus), ainsi que 10 Championnats de Russie de football.

1989: un dernier titre de champion d’URSS pour le Spartak

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