Les horloges pour radiophare

(photo: Musée polytechnique de Moscou)

Ces horloges ont pour fonction de commander l’allumage et de l’extinction d’un radiophare selon un programme horaire donné.
Un radiophare (ou radiobalise, ou balise radio), est un émetteur radio situé en un lieu connu, qui émet un signal radio continu ou périodique contenant une quantité limitée d’information (par exemple une information d’identification ou sa position) sur une fréquence radio donnée, aidant à la navigation maritime ou aérienne.
Parfois, la fonction de balise est combinée avec une autre transmission, dans ce cas des informations météorologiques.
C’est pour cela que cette horloge à un interrupteur qui permet à l’opérateur de choisir deux fonctions selon conditions météorologiques (sur la base du support): à gauche sur « Туман » (brouillard) si la visibilité dans la zone du phare est devenue inférieure à 7 miles, à droite sur « Ясно » (temps clair) dans le cas contraire.

C’est en 1946 que la 2e Fabrique de Montres de Moscou a commencé produire une première horloge pour radiophare (modèle ZchP, ЗЧП). Elle avait une balance bimétallique et sa précision était fournie par un stabilisateur d’impulsion spécial.
L’horloge est montée avec des amortisseurs dans un cadre métallique.
Elle pouvait ainsi être montée dans un camion.
Dimensions: 26 x 52 x 53 cm
Diamètre de la seule horloge: 20 cm
Profondeur de la seule horloge: 12,7 cm
Poids: 10 kg
Réserve de marche: 144 heures
Précision d’environ +/- 3 secondes par jour, si elle est remontée quotidiennement.

Le schéma de diffusion répétitif consistait en un signal unique d’une minute (déterminé et déclenché par les cames crantées interchangeables sur le pignon central à l’arrière de l’horloge) suivi de deux minutes de silence. Balancier avec réglage de précision par vis.

Conçue et produite à l’origine à la fin des années 1930 par la société berlinoise Pintsch Bamag pour l’armée de l’air allemande (Luftwaffe). La chaîne de production allemande a été confisquée en 1945 par les Soviétiques au titre des réparations de guerre et transférée à Moscou où des horloges presque identiques ont été produites avec des marques soviétiques.
Ci-dessous, la notice allemande de 1939.

(document: F. Gordon)
(photo watchru)

En URSS, ce système a été remplacé par le système GLONASS (ГЛОНАСС, acronyme pour глобальная навигационная спутниковая система: « Système Global de Navigation global Satelitaire).
Ce système, équivalait au système GPS en utilisant 24 satellites type « Ouragan » circulant sur une orbite moyenne.
Le première satellite a été lancé le 12 octobre 1982, mais le système ne sera complètement opérationnel qu’après la fin de l’URSS.

Satellite « Ouragan » de la première génération

Le modèle de signal unique de chaque horloge est indiqué par des marques colorées peintes à la main sur un anneau qui entoure le cadran. Voici différentes types de marquage de cadran:

(photos: Cordt Machen)

Ci-dessous, une exemplaire de la collection F. Gordon, avec feu son propriétaire.
voir la notice détaillée de cet exemplaire

Des radio-phares atomiques!

L’idée d’utiliser des générateurs atomiques pour le fonctionnement des phares et radiophares est venue Soviétiques pendant les années de développement de l’atome pacifique. Il s’agissait surtout des radiophares de la fameuse (et dangereuse) « Route maritime du Nord »

La « Route maritime du Nord » (en bleu) et la route traditionnelle (en rouge)

La plupart des phares construits étaient situés loin des localités, de sorte qu’est venu l’idée d’automatiser le processus d’aide à la navigation en fournissant aux phares un « atome pacifique ».
Le projet devait permettre aussi de le fonctionnement des générateurs atomiques, dans la perspective de leur installation dans les vaisseaux cosmiques.

Cette automatisation a été rendu possible grâce à l’invention des générateur thermoélectrique à radio-isotope (GTR) par des scientifiques soviétiques. Il s’agissait d’un dispositif transformant en électricité l’énergie thermique de la désintégration naturelle du strontium 90 (il n’y a donc pas de réaction en chaîne, pas risque d’explosion).

Les générateurs les moins puissants ont fonctionné pendant 30 ans au strontium-90. Ce radio-isotope a une puissance spécifique élevée (environ 2.315 W par kg), il est bon marché et émet presque exclusivement des radiations β dont il est très aisé de se protéger.
Leur conception des GTR soviétiques était extrêmement fiable et le construction solide. Plus de 1000 exemplaires ont été produits à la Fabrique « Baltique », à Narva, en RSS d’Estonie, essentiellement destinés aux phares et radio-phares.

40 phares qui opéraient sur des GTR le long de la côte de la mer d’Okhotsk, 30 près des Kouriles, 150 en Tchoukotka, 75 en Yakoutie, 100 à Taimyr, 153 sur la côte de la mer Blanche et de la mer de Barents.
A la chute de l’URSS, de nombreux phares ont été abandonnés et pillés. Les pillards n’ont même pas été arrêtés par les radiations – ils ont simplement démonté les GTR et jeté les piles à combustible. Heureusement, les conteneurs se sont avérés vraiment fiables et, dans la plupart des cas, il n’y avait pas de contamination radioactive.
Aujourd’hui, tous ces GTR sont hors service.

Un GTR en voie de démantèlement dans la Tchoukotka

Le célèbre phare Naka-Shiretoko misaki, (qui signifie « Au bout de la terre » en japonais), construit en 1939 par les Japonais au cap Aniva sur l’île de Sakhaline, a longtemps été équipé d’un GTR.
Sa lanterne éclairait, à une hauteur de 40 mètres, une mer dangereuse, pleine de brouillards, de courants et de hauts-fonds.
A la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’île est revenue à l’URSS (elle avait été Russe jusqu’à la guerre russo-japonaise de 1905), et les Soviétiques remplacèrent dans les années ’60 générateur diesel par un GTR.

Le phare Naka-Shiretoko misaki, sur le rocher de Sivuchya

Source: sur les phares « atomiques »